xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
Un autre regard sur l'annexion de la Savoie: l'annexion vue par les journaux, et par des diplomates suisses, anglais, américains... ICI
On est bien loin de la version de l'histoire de France officielle...
Le traité d'annexion de la Savoie est-il caduc? la question est posée....
Question N° : 76121 |
de M. Yves Nicolin ( Union pour un Mouvement Populaire - Loire ) |
Question écrite
|
Ministère interrogé > Intérieur et collectivités territoriales |
Ministère attributaire > Intérieur et collectivités territoriales |
Question publiée au JO le : 06/04/2010 page : 3856
Texte de la question
M.
Yves Nicolin attire l'attention de M. le secrétaire d'État à
l'intérieur et aux collectivités territoriales sur les risques
juridiques, politiques et institutionnels majeurs qu'entraîne le traité
d'annexion de la Savoie. À l'occasion du 150e anniversaire de
l'annexion de la Savoie par la France, des cérémonies et diverses
festivités et visites officielles sont programmées durant toute l'année
2010 notamment à partir du 24 mars puisque c'est par un traité signé à
Turin le 24 mars 1860 que les arrondissements de Nice et la Savoie (les
deux départements 73 et 74 actuels) ont été rattachés à la France du
second empire. Sa question se pose pour deux raisons juridiques
précises : d'abord et avant tout à l'échelle nationale parce que se
pose sans doute une question d'intégrité territoriale susceptible en
conséquence d'entraîner des effets internes importants. En effet, la
question brutale de savoir si ce traité du 24 mars 1860 est bien
toujours en vigueur se pose or ce traité est la clef de voute de tout
l'édifice juridique et administratif français en Savoie. Le problème
est simple : la France a enregistré à l'ONU sous le n° I-747 le traité
de paix du 10 février 1947 dont elle est signataire et dépositaire. Ce
traité comportait un article 44 faisant obligation à la France de
notifier à l'Italie les traités antérieurs suspendus par l'effet des
hostilités de la Seconde Guerre mondiale (traités au rang capital
desquels se trouvait naturellement le traité de rattachement
territorial de la Savoie et Nice de 1860). Cet article 44 comportait un
2e alinéa emportant l'obligation formelle d'enregistrer cette
notification et ce traité auprès du secrétariat général de l'ONU,
organisation créée deux ans auparavant en 1945. Cet enregistrement n'a
pas eu lieu. Le même article 44 prévoyait un alinéa 3 stipulant qu'à
défaut, la sanction encourue est l'abrogation (dans le texte : « les
traités qui n'auront pas fait l'objet d'une telle notification seront
tenus pour abrogés »). Il lui demande si le traité d'annexion de la
Savoie du 24 mars 1860 a été ou non enregistré auprès du secrétariat
général de l'ONU et, si cela n'est pas le cas, quelles mesures sont
prises par le Gouvernement pour traiter les problèmes subséquents au
plan juridique interne ? La question se pose également à l'échelon
international où elle rebondit sous l'angle de l'obligation de respect
par la France des normes de droit international en vigueur et qu'il
s'agit, en fait comme en droit, rien moins que de l'image et de la
réputation de l'État français dans la communauté internationale. Il
n'ignore pas que la charte de l'ONU de 1945, et notamment son article
1er, ainsi que de multiples résolutions adoptées par l'assemblée
générale, ont enjoint les États à faire aboutir le processus général de
décolonisation qu'avait initié dès 1941 la charte de l'Atlantique. Il
se trouve que 2010 marque officiellement la dernière année de la
deuxième décennie de la décolonisation onusienne. En 2010 pourtant, la
plupart des ministères et des administrations projettent cependant de
participer à des événements commémoratifs ou d'organiser des cérémonies
officielles en Savoie ou à Nice. Cela apparaît paradoxal si ce traité
d'annexion a été caché à l'ONU et qu'il est abrogé par l'effet d'un
traité signé à Paris. Si le traité de 1860 est abrogé du fait de son
non-enregistrement auprès de l'ONU, un processus de désengagement de la
France aboutissant à un référendum local vis-à-vis de la Savoie et de
Nice est inéluctable sauf à prendre le risque d'une condamnation de la
France par la Cour internationale de justice de La Haye. Il ne
s'agirait pas de voir la France internationalement sommée de fournir
des explications qu'elle n'aurait pas ou aurait insuffisamment
préparées, voire d'essuyer une grave condamnation puisque la zone
territoriale concernée couvre deux départements et demi. Au lieu
d'apparaître comme subissant une crise dans une affaire juridiquement
délicate voire perdue d'avance et doublement aggravée par la découverte
de la dissimulation grossière d'un territoire ayant fait l'objet d'une
annexion et par des commémorations officielles défiant (au sens
étymologique des termes) le droit international, ne pourrait-on
imaginer une prise en compte immédiate et en amont de cette question
mettant à l'abri la France de l'avalanche de questions juridiques et
politiques internes et internationales délicates que ce défaut
d'enregistrement risque d'engendrer et que l'annonce de festivités
officielles durant toute l'année 2010 risquent de déclencher et
d'aggraver encore ? Il souhaite donc connaître les mesures que le
Gouvernement entend prendre pour faire face et anticiper à l'ONU le
risque certain de reconnaissance internationale de la Savoie par un ou
plusieurs États étrangers ravis de brandir le traité de Paris de 1947
et reconnaître un nouveau micro-état géopolitiquement stratégique et
juridiquement détaché de la France sans aucune préparation ni
concertation.
Texte de la réponse
L'honorable
parlementaire se demande si le traité franco-italien signé à Turin, le
26 mars 1860, qui a rattaché les arrondissements de Nice et de Savoie à
la France est toujours en vigueur, compte tenu des dispositions qui
figurent dans le traité de paix du 10 février 1947 (art. 44), concernant
l'enregistrement auprès du secrétariat général des Nations unies des
traités bilatéraux conclus entre la France et l'Italie antérieurement à
la Deuxième Guerre mondiale. Le ministère des affaires étrangères et
européennes confirme que ce traité est toujours en vigueur. S'il est
exact que le traité de Turin du 26 mars 1860 doit être enregistré au
secrétariat de l'Organisation des Nations unies en vertu de l'article 44
du traité de Paris du 10 février 1947, l'absence d'un tel
enregistrement n'a aucune incidence sur l'existence ou la validité de ce
traité. En effet, selon l'article 102 de la charte des Nations unies,
l'absence d'enregistrement d'un traité au secrétariat de l'ONU n'emporte
qu'une seule conséquence, à savoir l'impossibilité pour les parties à
un tel traité de l'invoquer devant un organe de l'organisation. La
rédaction de cet article diverge à cet égard sensiblement de celle de
l'article 18 du pacte de la Société des nations qui disposait qu'aucun
traité ne serait obligatoire avant d'avoir été enregistré. Dans la
pratique, la sanction prévue par l'article 102 n'a, d'ailleurs, pas eu
l'occasion de jouer bien qu'aient été invoqués à plusieurs reprises,
devant la Cour internationale de justice, des traités non enregistrés.
Dans son arrêt du 1er juillet 1994 dans l'affaire Qatar/Bahreïn, la Cour
internationale de justice a d'ailleurs tenu à souligner que « le défaut
d'enregistrement ou l'enregistrement tardif est sans conséquence sur la
validité même de l'accord, qui n'en lie pas moins les parties » (Rec.
p. 122). L'article 44 du traité de paix signé à Paris, le
10 février 1947, ne prévoit pas de son côté un régime de sanction en cas
d'absence d'enregistrement différent de celui de l'article 102 de la
charte de l'ONU puisqu'il précise seulement que seront tenus pour
abrogés les traités bilatéraux conclus avec l'Italie par chacune des
puissances alliées antérieurement à la guerre qui n'auraient pas été
notifiés à l'Italie dans un délai de six mois à partir de l'entrée en
vigueur de ce traité (17 septembre 1947). En revanche, il ne tire aucune
conséquence de l'absence d'enregistrement au secrétariat de l'ONU de
tels traités, ce qui renvoie donc au régime de droit commun défini par
l'article 102 de la charte. Il convient enfin de relever que le traité
de Turin du 26 mars 1860 a été notifié à l'Italie conformément aux
stipulations de l'article 44, 1er paragraphe, du traité de Paris du
10 février 1947. La liste des traités notifiés à l'Italie a été publiée
au Journal officiel du 14 novembre 1948. Le ministère des affaires
étrangères et européennes a néanmoins pris, d'ores et déjà, toutes les
dispositions utiles pour que le traité de Turin du 24 mars 1860 soit
bien enregistré dans les meilleurs délais auprès du secrétariat de
l'Organisation des Nations unies.
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx